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juin 09, 2017 - Commentaires fermés sur Avant Première DUBLIN à Couvet

Avant Première DUBLIN à Couvet

Jeudi 8 juin 2017. Après trois jours de fraîcheur, il faisait à nouveau un temps radieux et doux. Dans tout le canton, c’était le soir où tout le monde semblait s’être donné le mot pour concurrencer les attrayantes terrasses au bord de l’eau pour organiser un événement;  portes ouvertes, vernissages, projections spéciales… ce cher Facebook me proposait pas moins de 6 événements auxquels participer!

Et, nous avions choisi ce jour-là pour faire l’avant-première de Dublin et parler des accords du même nom, dans une salle obscure, à 40 minutes des centres névralgiques du canton ?!

C’est donc avec peu d’illusion que nous avons  tout de même rassemblé master du film et bouteilles pour l’apéro et que nous nous sommes rendus à Couvet pour préparer la soirée.

Accueillis chaleureusement par Bertrand Stoller qui nous mettait gracieusement la jolie salle du Colisée à disposition pour cette soirée, notre doute fut estompé vers 19h30 avec l’arrivée d’une quinzaine de personnes, puis totalement jeté aux oubliettes devant l’arrivée de plusieurs petits groupes qui se dirigeaient vers le cinéma. Au final, près de 80 personnes sont venues nous rejoindre!!

 

bénévoles jafari mabubeh monde1 yoelandco
Durant la discussion,  Vincent Schlatter, chef de l’office social de l’asile en premier accueil, Jean-Philippe Jubin responsable du centre d’accueil de Couvet  et Louise Wehrli, de l’association  Droit de Rester, ont pu décrire leur travail et leurs rôles respectifs dans le complexe système de l’asile en suisse et dans lequel les accords Dublin ont un poids considérable.

 

colisee

 

Un des moments forts fut celui où Fehmi Kaçan, réfugié kurde de Turquie, prit la parole pour raconter l’imbroglio administratif dans lequel il se démène depuis près d’un an et demi.

Déjà réfugié en Irak depuis des années pour fuir les persécutions dont il était victime en tant que kurde en Turquie,  cet infirmier s’occupait régulièrement des nombreux blessés dus à la guerre ou aux attentats sur le sol irakien. L’Etat Islamique gagnant du terrain et menaçant toujours plus les kurdes de cette région, il se décide, il y a deux ans, à rejoindre son frère, déjà en établi en Suisse depuis des années.

Passant par différents pays pour atteindre la Suisse, il a été « dubliné » par les autorités dès les premiers mois de son arrivée, la première trace de son périple ayant été enregistré en Bulgarie.

Fehmi Kaçan nous a expliqué qu’il ne remettait pas en cause son obligation à se soumettre au renvoi Dublin, mais qu’il remettait en question le pays vers lequel il est censé se rendre. En effet, la Bulgarie est un pays allié de la Turquie et rien ne lui garantit qu’il ne serait pas renvoyé vers cette dernière par les autorité bulgares une fois sur leur sol. Mais ses nombreux courriers pour tenter d’expliquer ce risque n’ont a l’heure actuelle toujours pas convaincus. Soutenu par l’association le droit de rester, il tente comme il peut de faire valoir son droit à la sécurité pour éviter ce renvoi…

Une situation parmi des milliers de cas de renvois Dublin spécifiques, souvent malheureusement traités de manière automatique… et qu’il est souvent délicat à gérer pour les personnes directement au contact des demandeurs d’asile, comme les équipes des centres de premier accueil.

Ces dernières ont l’obligation d’appliquer ces directives qui peuvent parfois sembler arbitraires, tout en ayant conscience des situations particulières de chacun. Une situation pas toujours évidente à vivre. C’est pourquoi, et M. Jubin l’a très bien exprimé, elles essaient de se concentrer uniquement sur le présent: sur ce moment  si particulier où les demandeurs d’asile sont dans cette attente administrative à la fois pleine de promesses et de doutes. Au quotidien, le débat sur ces accords n’a pas sa place. Seule compte la manière d’être des uns et des autres pour gérer l’attente, avec une seule philosophie : être le plus humain possible…

farzaneh et jafari famille

La famille Jafari et d’autres acteurs du film étaient également présents pour rencontrer les spectateurs et partager leur expérience de vie dans les centres et leur expérience du tournage. Un bel échange, à l’image de l’ouverture dont avait déjà fait preuve l’office social de l’asile en premier accueil en ouvrant ses portes au tournage et qui a permis aux spectateurs d’échanger et de se rencontrer jusqu’à tard dans la soirée…

fin de soirée
Un immense merci à tous ceux qui ont permis cette soirée et ce film, sans lesquels rien de tout cela n’aurait été possible. Et tout particulièrement: aux intervenants, à Bertrand Stoller pour la projection, à Kevin Nebel pour la délicieuse absinthe et à Farzaneh Piran pour la traduction au pied levé!

mars 09, 2017 - Commentaires fermés sur DUBLIN… courgemétrage

DUBLIN… courgemétrage

novembre 11, 2016 - Commentaires fermés sur DUBLIN… premiers pas…

DUBLIN… premiers pas…

Si 2016 a été personnellement une année pleine d’activités cinématographiques et créatives avec la sortie de Nettoyeurs de Guerre, la réalisation et l’inauguration du Tramoscope ou encore la création de la structure de production Les Regardiens, 2016 aura surtout été une année pleine de mauvaises nouvelles pour le monde, où il nous a semblé plus perdre que gagner à grandir… On a soudain pris conscience que l’humanité est faite de périodes fastes et paisibles et de périodes déstabilisantes qui provoquent la peur et le repli sur soi, libèrent des démons que l’on pensait enfermés dans les livres d’histoire…  Nous ne savions pas que nous étions en haut de la vague… Il va maintenant falloir apprendre à surfer pour ne pas se laisser noyer dans la descente, mais au contraire en tirer le maximum d’énergie constructive!

Jolie théorie… Mais en pratique? En pratique, avant de boire la tasse, j’ai eu envie de partir rencontrer ceux qui échouent depuis quelques temps par milliers sur nos côtes, non par choix, mais par survie… J’ai eu envie d’entendre de leur propres voix leurs récits, leurs projets, leurs colères aussi. Non juste pour témoigner de leur situation, mais pour bien réaliser ce qui est entrain de leur/nous tomber dessus… et pour tenter ensemble de contrecarrer à notre échelle les raccourcis faciles et les amalgames bienpensants à ce sujet…  J’avais envie de faire un projet avec eux, de leur donner une raison de rencontrer les Suisses du coin (et pourquoi pas d’autres gens ailleurs), avec un autre regard que celui de «migrant ».

Mot ô combien terrible par ce qu’il sous-entend. En étant migrant, on est seul responsable de son départ, de la réussite de son exil choisi. On est comme un étudiant qui part faire ses études à l’étranger, ou un travailleur qui émigre parce qu’il a une opportunité professionnelle dans un autre pays. Ce mot inclut la notion de choix  et d’opportunité, et exclu toute notion de fuite. Ce qui est à l’opposé de la plupart des situations vécues par les milliers de réfugiés qui arrivent actuellement à nos frontières et qui fuient guerres, obscurantismes, dictatures.

Mais comme il est plus facile intellectuellement de refouler des gens qui tentent leur chance plutôt que des gens qui fuient un danger… on parle de migrants…

En parallèle de ces réflexions, le concours de films du courgemétrage qui a lieu annuellement dans le canton de Neuchâtel et dont le principe est de donner aux équipes inscrites le même lieu de tournage, proposait cette année le décor du home bâlois. Une vieille maison belle époque de camp d’été. Une maison vide, dans laquelle je me suis demandé pourquoi il n’y avait pas de réfugiés…  (bon, suite à deux jours de tournage, on comprend que le bâtiment est bien trop vétuste pour accueillir plusieurs personnes dans des conditions viables). Mais l’idée a fait son chemin et j’ai décidé d’en profiter pour réaliser mon projet dans ce cadre.

La projection du film lors de la soirée du festival serait l’occasion d’intégrer les réfugiés dans un projet typiquement neuchâtelois et de parler aux jeunes de la région de la situation des « migrants » qu’ils croisent quotidiennement à la gare. Une belle opportunité également de faire se rencontrer tout ce petit monde grâce au Cinéma…

En novembre 2016, j’ai donc inscrit Les Regardiens au courgemétrage et j’ai contacté le service des migrations…

juillet 30, 2015 - No Comments!

Les larmes du coeur

A chaque fois je suis surprise. A chaque fois ça me touche toujours autant. A chaque fois, je me dis que tous les efforts et les sacrifices pour exercer ce métier en valent la peine quand arrive ce miracle. Quand l’histoire que j’essaie de raconter touche les gens qui la regardent, qui la découvrent, qui se l’approprient…  Lorsque résonnent des cordes sensibles tout au fond de coeurs qui me resteront à jamais inconnus, et qui se mettent à vibrer avec les mots et les images, les sons et le montage… Le film alors « parle » avec celui qui le regarde. Ce moment de grâce, cette liaison soudaine et improbable, est le plus beau cadeau qu’on puisse offrir en tant que conteur d’histoires … et c’est le plus beau cadeau qui puisse nous être offert en retour.

Alors, quand en plus on en est le témoin privilégié et que l’on voit un ou une inconnue, les yeux pleins de larmes devant son film de moins de deux minutes nous regarder en souriant, mi gêné mi surpris,  et nous remercier de ces quelques larmes…

on retrouve toute l’énergie qui parfois manque face aux heures difficiles d’un secteur en pleine mutation… On se rappelle pourquoi on fait le métier de cinéaste, et pourquoi il est si important de résister pour ne pas devenir de simples « générateurs de contenus » à la recherche du maximum de clics…

Parce que le Cinéma est un langage qui parle bien au-delà de la surface des choses… et que les êtres humains sont bien plus que des consommateurs de contenus…